La Maison Camille Giroud est une ancienne caviste bourguignonne dont les origines remontent au moins à 1865.
C’est en effet à cette date que M. Camille Giroud arrive dans la région pour épouser une jeune femme dont le père a combiné les métiers de tonnelier et de caviste. Il a repris ce dernier métier, ce qui signifie que cette structure existait déjà avant cette union. C’est une Maison qui est restée familiale pendant très longtemps avec un style très marqué à l’époque, contrairement à aujourd’hui.
L’histoire récente de la Maison Camille Giroud a été bouleversée en 2001 avec la vente de la propriété. Il a été acheté par un groupe, principalement américain, d’amateurs de vin. C’était pour eux un achat purement de plaisir, de passion et non d’investissement. Leur plaisir est de participer à une structure qui fait des vins fins en Bourgogne et qu’ils apprécient la dégustation
Allons ensemble à la rencontre de cette Maison et de son Président épicurien, M. Carel Voorhuis. à table, ayant des bouteilles dans leur cave. C’est surtout pour le plaisir !
Pourquoi vous êtes-vous tourné vers le monde du vin ?
Carel Voorhuis : Même si je ne viens pas d’une région viticole, c’est quand même une histoire de famille. Mon père avait toujours été passionné par le vin. Il était avocat aux Pays-Bas. Lorsqu’il a pris sa retraite, il a vendu son cabinet et acheté des vignes dans le Jura. Pour ma part, j’avais commencé à étudier pour devenir vétérinaire et j’avais fait quelques stages, mais j’ai trouvé que le vin et la vigne étaient, à mon avis, beaucoup plus intéressants. Finalement, mon cours de médecine vétérinaire s’est terminé rapidement. Tout mon bagage scientifique m’a été laissé par cette expérience…
D’ailleurs, à l’origine ce que j’aimais dans le vin, c’était la technique, le côté scientifique du vin. Aujourd’hui, ce qui continue de me fasciner, c’est le lien entre le terroir, le vin, ce qui en résulte et l’alchimie que la plante apporte entre les deux. Ce n’est que depuis que je suis Président de la Maison Camille Giroud que je suis en charge de la
une partie de la relation avec les clients et les fournisseurs. C’est une partie que je trouve aussi très intéressante… C’est le prolongement de l’expérience!
C’est avant tout une passion, mais c’est aussi une possibilité de carrière stimulante et diversifiée. Il n’y a jamais deux jours de travail identiques. C’est l’antiroutine par excellence. Comme d’ailleurs, pas deux millésimes se ressemblent !
Cependant, je garde encore un pied dans l’aspect technique, la production. C’est une petite Maison et ma formation en DNO (et BTS viti-oeno) me permet de le faire. Je ne viens pas d’une école de commerce. Mon rôle de directeur général est important, mais surtout
prendre soin de la partie technique : suivi des vignes, vignes à racheter, élevage…
Y a-t-il une signature commune aux vins ? Une signature qui aide à les reconnaître à l’aveugle ?
C.V. : J’essaie de laisser la place au terroir et à la matière première. L’idée est d’avoir la traduction la plus fidèle possible de l’origine du vin. Il va donc, à mon avis, à travers la pureté et l’élégance qui est une signature de la Bourgogne en général. Et pas par le boisé ou les subterfuges œnologiques qui marqueront les vins. Nous sommes très naturels, très locaux. Beaucoup d’entre nous ont ce désir. Pour moi, ma fierté est de mettre mon ego de côté pour laisser ce terroir s’exprimer et donc n’avoir pas une signature dans les vins mais une qualité, une sincérité…
Vous parlez du côté naturel, du côté des fruits, avez-vous une approche environnementale?
C.V. : Nous étions certifiés biologiques jusqu’à récemment en tant que vignerons. Nous avons eu une succession difficile de millésimes en Bourgogne : un grand nombre de producteurs ont décidé de se donner la chance d’intervenir avec des produits non autorisés comme biologiques plutôt que de prendre des risques insoupçonnés pour leurs récoltes. À un moment donné, économiquement parlant, cela devient compliqué.
Par conséquent, nous avons également mis la certification de côté car avoir deux vins certifiés sur une trentaine de références n’a pas de sens.
Techniquement, cela n’a rien changé. Nos vignes sont toujours traitées selon les spécifications biologiques ainsi que nos vinifications. Il s’agit de levures et de bactéries lactiques indigènes. Nous n’inoculons pas, nous n’ajoutons pas d’enzymes, nous ne sulfitons pas pendant la fermentation. Nous n’avons pas de philosophie du vin naturel, mais à mon avis, réduire les doses de soufre
globalement et surtout lors de la vinification permet d’obtenir des vins plus soyeux, expressifs avec complexité. Nous le faisons donc dans une logique de conviction et non de certification.
Vous nous avez parlé au début de cette interview d’un changement de style dans les vins, pourriez-vous nous en dire un peu plus ?
C.V. : Ce sont des vins tanniques, avec un grand potentiel de vieillissement, voire austères dans leur jeunesse. Il y avait des extractions très approfondies, un long vieillissement en fûts et quand ils étaient mis en bouteille, ils avaient besoin de beaucoup de temps. C’était sa justification dans la crise du phylloxéra qui avait été un choc pour les propriétaires de l’époque. La pénurie de vin était impensable, alors ils voulaient avoir des vins dans leur cave qui seraient prêts à être mis sur le marché si cela se reproduisait. L’idée était donc de faire des vins qui pouvaient défier le temps et qui allaient s’améliorer sur de nombreuses années, mais il n’y a jamais eu de seconde crise.
Progressivement, les habitudes de consommation ont changé ainsi que les goûts des consommateurs. Les gens avec une cave interne qui pouvait mettre les vins au repos pendant 10/15/20 ans, il y en avait aussi de moins en moins. La Maison s’est donc progressivement retrouvée avec ses caves pleines
mais sa caisse est vide, ce qui a aussi conduit à la vente de la structure… Depuis, nous nous sommes tournés vers des vins plus classiques bourguignons. Aujourd’hui, tout est vinifié ici aussi. Nous produisons une trentaine d’étiquettes avec 75% de vins rouges et 25% de vins blancs. C’est certainement une large gamme mais à l’intérieur il y a parfois des micro-cuvées avec un ou trois fûts.
Avez-vous des plans précis pour les successions?
C.V. : C’est difficile de se projeter aujourd’hui. Il faudrait avoir une bonne récolte en 2022 pour y penser. On va croiser les doigts! Il y a des projets, mais pas à court terme. À long terme, on aimerait en faire un peu plus. On est actuellement à 120/130 000 bouteilles par année. L’idée d’aller au-delà nous tente, tout comme l’extension de la gamme vers des vins avec un bon rapport qualité/prix comme la Côte Chalonnaise, le Beaujolais : c’est une idée.
Merci à la Maison Camille Giroud pour l’accueil. – J.C.C.
Maison Camille Giroud
3 Rue Pierre Joigneaux, 21200 Beaune (France)
www.camillegiroud.com