Château Beychevelle est une propriété médocaine située en AOC Saint-Julien et qui a été reconnue en 1855 comme 4ème Grand Cru Classé. Cette cave a une riche histoire avec des racines au milieu du 16ème siècle.
Le premier château fut construit en 1565 par Mgr François de Foix-Candale dont la nièce hérita de la propriété et épousa le duc d’Epernon. Bien sûr, à l’époque, il y avait certainement de la vigne, mais le domaine n’était pas uniquement orienté vers cette activité et était ensuite géré en polyculture. Par la suite, il fut partiellement détruit pour être reconstruit en 1757 par le marquis de Brassier. Il fut l’un des principaux architectes du vignoble et de la renommée des vins de Beychevelle à l’époque. Après la Révolution française, la propriété a été saisie puis vendue aux enchères. Il a ensuite été acheté par une branche de la famille Brassier pour être vendu plus tard. Puis la propriété a changé de mains trois fois avant d’être rachetée par la famille Achille-Fould qui a énormément travaillé pour la reconnaissance qualitative des vins de Beychevelle. Le domaine est resté au sein de cette famille jusqu’au décès d’Aymar Achille Fould en 1986. À l’époque, il a été acquis par le groupe japonais de spiritueux Suntory et par GMF.
En 2010, l’actionnariat change avec l’arrivée du groupe Castel, qui acquiert 50% du Château Beychevelle et la montée de Suntory, également à 50%. Suite à cette arrivée, un grand projet de création d’un nouveau cuvier a été lancé afin de donner à Beychevelle et son équipe un outil de pointe pour répondre à leurs exigences de travail. Après sept longues années de réflexion et de travail, la nouvelle cave est inaugurée. Actuellement la propriété s’étend sur 94 hectares dont 80 en AOC Saint-Julien et 14 en Haut-Médoc. Château Beychevelle produit en moyenne 20 000 caisses de Grand Vin (environ 240 000 bouteilles) et 150 000 bouteilles de L’Amiral de Beychevelle chaque année. » Nous travaillons beaucoup pour produire, en moyenne 60% de Grand Vin chaque année. En 2014 nous étions plus autour de 70% »
Nous vous invitons à aller ensemble à la rencontre de cette propriété et de son directeur général, M. Philippe Blanc.
D’où vient le nom de la propriété ?
Philippe Blanc : Nous devons ce nom à Jean-louis Nogaret de la valette, duc d’Epernon, gouverneur de guyenne et surtout grand amiral de la Marine royale française (Henri iii). Le nom Beychevelle vient de la contraction des mots gascons ‘ Beych ‘ qui signifie « inférieur » et “ velle “ la voile… « Bateau qui baisse la voile ». Ce nom fait référence à l’ancienne tradition des marins qui ont rejoint le Port de la lune (Bordeaux) et qui baissent la voile en passant devant la propriété, tradition marquant le respect du grand homme ou une exigence du grand amiral. La légende n’est pas très claire sur ce point… Cependant, le fait est que les navires ont baissé les voiles. On retrouve aussi cette histoire à travers notre étiquette. Certains le voient comme un drakkar, d’autres comme un bateau chinois, mais c’est en fait une péniche (bateau typique de la gironde) parée d’un griffon. Ce dernier est un clin d’œil au gardien du cratère de vin du roi Dionysos, dieu du vin chez les Romains.
Si vous deviez décrire en quelques mots quel est l’esprit de Beychevelle, l’équipe et son vin, que diriez-vous ?
P.B. : c’est lors de mes études d’agronomie que j’ai découvert la viticulture. Cela m’a rapidement fasciné autant par la pratique, la culture de la vigne, le vin, la portée symbolique du produit que par l’étendue des possibilités et des choses à faire. Dans le vin, il y a des valeurs, une histoire et un lien étroit avec notre culture que je ne trouve pas personnellement dans le lait ou le blé. Pour ce qui est de mon arrivée au château Beychevelle, c’est arrivé par hasard. Un de mes anciens collègues de promotion était venu à la propriété. Par coïncidence, un événement de dernière minute signifiait qu’il ne pouvait pas accepter le poste. Il a donc eu la gentillesse de me le faire savoir, j’ai postulé et j’ai été embauché. Depuis ce jour, j’ai ressenti un sentiment de bonheur et un certain honneur d’occuper ce poste de directeur général.
De formation je suis donc un technicien. J’ai certes joué un rôle de CEO, mais j’ai aussi été très souvent dans le domaine technique car en 1995 nous n’avions pas une grande équipe comme aujourd’hui. Il n’y avait qu’un seul maître de chai, un chef de culture avec toutes les qualités et les limites de l’époque. Nous avons ensuite travaillé pour enrichir et élargir l’équipe avec des personnes plus qualifiées ou même plus qualifiées que moi. Cela m’a permis de déléguer au fur et à mesure. Aujourd’hui, 20 ans plus tard, j’ai encore une fibre technique, c’est toujours ce que j’aime et ce qui me fascine dans ce métier… c’est ma raison d’être.
Comment reconnaissez-vous aveuglément les vins du Château Beychevelle ?
P.B. : c’est une question difficile et un exercice qui demande beaucoup d’humilité. je ne pense pas qu’il soit possible de trouver systématiquement son vin dans une étagère… On le cherche systématiquement, parfois on le trouve mais honnêtement je suis très humble sur la dégustation car on se trompe si souvent, on se trompe plus souvent. Je suis donc vraiment très prudent… je dirais que nous essayons d’avoir systématiquement dans chacun de nos millésimes : élégance, concentration, harmonie, un vin équilibré… Plus simplement chercher à faire de bons vins et cela donne envie de boire. Nous ne sommes certainement pas les seuls à le faire, à le chercher… est-ce que c’est ce qui fera ressortir un Saint-Julien dégustation, aveugle ? j’ose espérer que non…
Personnellement j’ajouterais qu’une belle puissance maîtrisée, un côté graveleux / frais racé , une forte présence de Merlot à 45/51% (alors que nous sommes sur la rive gauche) ainsi qu’une belle qualité du fruit sont aussi des avantages. Un autre marqueur important pour la propriété est une certaine richesse de tanins.
Quelles sont les particularités et les atouts des terroirs du Château Beychevelle ?
P.B. : La plupart des parcelles qui composent le grand vin de Beychevelle sont situées sur deux plateaux (situés à basse altitude) de graves garonnaises profondes de l’époque güntz sur un sous-sol argileux. Le premier est le plateau sud qui part de la route nationale vers notre illustre voisin. Le second est un plateau situé au nord de la cave, c’est notre bijou ! il s’étend jusqu’au fond du château léoville- Barton. Ce sont les raisins de ces deux plateaux qui constituent la quasi-totalité de notre grand vin. Là encore, cela démystifie le rôle et la magie de l’assemblage car globalement tout ce qui est produit sur ses deux grands groupes va dans le premier vin… C’est aussi la beauté de notre terroir que chaque année il ne fait pas. il n’est pas nécessaire de se demander si nous allons prendre 25 %, 50 % ou 75 % de nos parcelles, mais 100 %… Nous avons l’habitude de dire que si nous avions seulement eu cette parcelle nous n’aurions pas classé comme un 4 ème grand cru classé mais comme un second.
Ces deux blocs font partie de la propriété depuis 1855. Notre parcelle a peu changé depuis le classement… Nous avons dû augmenter de 20/25% maximum et la plupart du temps c’était pour rendre notre deuxième plus complexe, travailler sur notre deuxième étiquette (Admiral de Beychevelle ). Ce vin n’est pas conçu comme un second vin mais comme une véritable seconde étiquette, avec sa propre identité, ses qualités, son ADN… ce n’est pas, comme ce qui a été fait à Bordeaux il y a quelques années, le vin dans lequel « nous mettons ce qui reste ou les jeunes vignes ». Nous avons un vignoble spécifique dédié à ce nectar… avec une moyenne d’âge des vignes de 35 ans. Nous travaillons beaucoup sur ce vin… et nous en sommes aussi très fiers. C’est l’un de nos grands développements depuis 25 ans.
Vous avez des projets pour Château Beychevelle ?
P.B. : Non, nous n’avons pas vraiment de projets à court terme pour le moment. Mais nous avons travaillé sur les choses internes comme la communication, l’image de l’humain… à long terme ce qui m’intéresse c’est l’agroforesterie. C’est absolument incroyable, mais pas facile à mettre en œuvre.
Avez-vous une anecdote sur la propriété?
P.B. : Mon anecdote va être classique, mais je dirais que chaque jour c’est un grand plaisir d’être sur cette propriété, de rencontrer des gens que je n’aurais pas pu rencontrer en étant dans un magasin de yaourt ou autre. pour moi, cela fait partie du bonheur que nous procure le travail. Il y a beaucoup de gens qui me disent qu’ils ont découvert le vin de Bordeaux avec Beychevelle… c’est une vraie fierté pour nous ! c’est aussi une incroyable motivation pour moi.
Merci à Philippe Blanc et Géraldine Marquay-Santier pour leur accueil chaleureux. – J.C.C.
Château Beychevelle
33250 Saint-Julien-Beychevelle – France
www.beychevelle.com